La date du Brexit a été repoussée au 31 octobre 2019. Un sursis de 6 mois est accordé aux Européens et aux Britanniques pour trouver un accord sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. L’objectif est d’éviter une rupture brutale : le « no deal » ou « hard Brexit ». Quels sont les scénarios possibles et les conséquences pour les sociétés implantées sur le territoire belge ? Si certains économistes s’alarment d’un Brexit sans accord, d’autres s’accordent sur un point : il pourrait, au contraire, créer de la valeur. Et si le Brexit était une opportunité pour les entreprises belges dans certains secteurs ?
Brexit : chronologie des événements et scénarios possibles
Depuis le référendum du 23 juin 2016, le Brexit, contraction des termes anglais « british » (« britannique ») et « exit » (« sortie »), occupe tous les esprits des dirigeants européens. Les Britanniques ont voté pour la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Des tractations sont en cours pour établir les conditions du Brexit. La première ministre Theresa May a négocié un accord avec Bruxelles. Mais le parlement britannique l’a déjà rejeté à trois reprises. A chaque fois, de nouvelles concessions sont négociées pour une version améliorée. Mais à chaque fois, les députés britanniques refusent de ratifier cet accord. La dernière tentative du 29 mars 2019 s’est soldée par un nouvel échec. Le Conseil européen a finalement accordé un nouveau report du Brexit jusqu’au 31 octobre 2019.
Tout comme les autres pays, la Belgique est bien sûr concernée par ce bouleversement sur la scène internationale dont l’issue reste encore incertaine. Plusieurs scénarios sont envisageables :
- Le « soft Brexit ». C’est une sortie avec un accord négocié qui permettrait le maintien de l’Union douanière ou du Marché intérieur avec des aménagements.
- Le « hard Brexit ». Aucun accord n’est trouvé. Le Royaume-Uni devient donc un pays tiers. Ce « no deal » serait le pire scénario : les règles facilitant les échanges entre les 27 Etats membres et le territoire britannique seraient caduques. Les relations économiques entre les pays seraient régies par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Les Européens et le gouvernement britannique affichent clairement leur volonté d’éviter cette situation extrême.
- Un nouveau référendum. Cette solution est évoquée pour sortir de l’impasse. Mais elle n’est pas la plus plausible, car il faudrait faire passer une loi.
- Un abandon du Brexit. Même si cette éventualité a été évoquée, il est peu probable qu’elle aboutisse, car elle impliquerait l’organisation de nouvelles élections.
Le calendrier joue un rôle important
Le Brexit pourrait en effet avoir lieu :
- Avec un accord : dès le premier jour du mois suivant une ratification de l’accord par les députés britanniques.
- Avec ou sans accord : le 31 octobre 2019. C’est la date limite fixée pour trouver un accord. Si ce n’est pas le cas, le « no deal » sera effectif dès le 1er novembre.
- Le 1er juin 2019 : les Britanniques doivent impérativement participer aux élections européennes du 23 mai. Sinon, le Royaume-Uni quittera l’Union européenne sans accord dès le premier jour du mois suivant.
Conséquences négatives du Brexit : la Belgique ne sera pas épargnée
Les entreprises belges qui commercent avec le Royaume-Uni vont être fortement impactées notamment en cas de Brexit sans accord.
Le « no deal » mettrait fin à l’union douanière, à la libre circulation des marchandises, des capitaux, des personnes et des services, et rétablirait les barrières réglementaires à l’export et à l’import.
Pour en savoir plus lire l’article : Import / Export, comment bien se préparer au Brexit ?
Les conséquences négatives du « hard Brexit » pour les entreprises belges seraient multiples :
- Faire des affaires avec le territoire britannique sera bien plus complexe. Les exportations et importations vers ou depuis le Royaume-Uni seront soumises aux droits de douane et à la TVA. Les surcoûts et les délais d’approvisionnement pourraient pousser certaines entreprises belges à la banqueroute.
- Employer des salariés britanniques sur le sol belge ou des Belges dans une filiale britannique nécessitera des formalités supplémentaires (permis de travail).
- Les certificats, licences ou homologations délivrés par le Royaume-Uni pour des biens ou des services ne seront plus valables dans l’Union européenne, et inversement.
- L’importation et l’exportation de marchandises réglementées (produits chimiques…) seront soumises aux autorisations de mise sur le marché britannique ou européen.
Même si les modalités du Brexit sont encore floues, il est nécessaire de s’y préparer pour en limiter les conséquences.
Et si le Brexit était une opportunité pour les entreprises belges ?
Si l’impact du Brexit risque d’être particulièrement significatif dans certains secteurs à cause des problèmes administratifs et financiers, d’autres pourraient tirer leur épingle du jeu.
Le Brexit serait une source d’opportunités dans différents domaines. Le directeur de la banque italienne UniCredit, Jean-Pierre Mustier, en est lui-même convaincu.
Le secteur immobilier
La crainte d’un Brexit sans accord conduit de nombreux belges expatriés outre-Manche à envisager un retour en Belgique. Ces mouvements de salariés font les affaires des agents immobiliers : ils voient le nombre de demandes de logements et leur clientèle exploser ces derniers mois. Par effet domino, les entreprises de déménagement profitent de cette embellie.
Cette tendance concerne également les entreprises qui sont implantées au Royaume-Uni. En Europe, des villes comme Paris, Berlin, Francfort, mais aussi Bruxelles, tentent de convaincre de leur attractivité. L’Agence Européenne du Médicament de Londres (EMA) a fait le choix de déménager à Amsterdam. Capitale de l’Union européenne, la Belgique est en bonne place pour séduire les investisseurs, puisqu’elle dispose d’une soixantaine d’immeubles de bureaux à des prix compétitifs. L’assureur Lloyd’s of London a déjà transféré son siège social à Bruxelles. De même, l’assureur japonais MS Amlin a annoncé qu’il ouvrirait une filiale européenne au cœur de la capitale belge.
Le secteur financier
Tout comme le Luxembourg, la Belgique pourrait être l’une des destinations privilégiées du private equity, ces titres financiers de sociétés non cotées. Avec le Brexit, les grands noms du capital-investissement privé souhaitent domicilier leurs fonds non plus au Royaume-Uni mais en Europe, stable fiscalement. Le territoire belge a toutes ses chances de voir d’importantes levées de capitaux et de renforcer sa position de place financière.
Les cabinets de conseil
Que ce soit dans le domaine économique, social, fiscal et juridique, les cabinets de conseil belges sont bien plus sollicités par les entreprises qui travaillent à l’international. Le Brexit constitue pour eux une réelle opportunité de faire croître leur chiffre d’affaires.
Certains cabinets d’avocats ont mis en place une offre « spécial Brexit » pour répondre à leur clientèle sur les problématiques liées à la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Ils les aident à se poser les bonnes questions pour identifier les difficultés concrètes qui vont survenir et s’y préparer.
D’autres services deviennent également incontournables : une agence spécialisée en traduction jurée est une alliée indispensable pour assurer la stabilité juridique de l’activité des entreprises belges avec le Royaume-Uni. Composée d’une équipe de traducteurs assermentés, elle utilise son expertise juridique pour traduire les contrats renégociés ou les nouveaux contrats établis suite au Brexit. Elle produit des documents officiels certifiés conformes aux originaux et valables aussi bien en Belgique qu’au Royaume-Uni. Sa spécialisation juridique fait sa force en plein Brexit.
Les producteurs locaux
Pour certains producteurs belges, la perspective du Brexit n’est pas source d’inquiétude. Il pourrait même être à l’origine d’une augmentation de la production. C’est le cas de la cidrerie Stassen. Si elle exporte 70 % du cidre produit à Aubel, seulement 5 % est destiné au Royaume-Uni. Sa clientèle européenne a tendance à se développer : face aux difficultés administratives et financières envisagées après un « hard Brexit », de nouveaux clients contactent l’entreprise belge. Ils cherchent un fournisseur fiable en termes de délais d’approvisionnement et exempt des taxes douanières.
Si l’avenir des relations entre le Royaume-Uni et les 27 pays de l’Union européenne reste encore incertain après le Brexit, les entreprises en Belgique ont une carte majeure à jouer pour tirer parti de cette situation. Malgré le discours alarmiste, le « no deal » pourrait être une opportunité dans bien des secteurs, notamment les services, sur le territoire belge.